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Le LAPP célèbre les 10 ans de la découverte du boson de Higgs

En 2012, une annonce a fait grand bruit dans la communauté scientifique mais aussi dans le monde. Les collaborations ATLAS et CMS au CERN ont annoncé la découverte d’une nouvelle particule élémentaire, qui s’est révélée être le boson de Higgs. Nous retraçons aujourd’hui comment s’est déroulé cette découverte et ce qu’elle implique pour le monde de la physique.

Une découverte attendue depuis des décennies

En 1964, Robert Brout, François Englert et Peter Higgs proposaient l’existence d’un nouveau champ quantique (champs de Higgs) et de sa manifestation quantique (le boson de Higgs). Seules les particules qui interagissent avec le champ de Higgs acquièrent une masse. Ce mécanisme résoudrait un problème de symétrie observé dans le Modèle Standard de la physique des particules. Cette solution fonctionnait mathématiquement, mais n’était pas encore prouvée dans la réalité.

Pour produire un boson de Higgs, les scientifiques ont dû réaliser des collisions de particules à des énergies suffisamment élevées, sans savoir précisément quelle était la masse du boson de Higgs. Le LEP (prédécesseur du LHC au CERN, 1989-2000), n’avait pas permis de découvrir le boson de Higgs.

Avec la mise en route du LHC et des détecteurs ATLAS et CMS en 2010, l’exploration de plus hautes énergies est devenue possible.

Le groupe ATLAS au LAPP s’est concentré sur la recherche du boson de Higgs dans sa désintégration à deux photons (H→ɣɣ). Ce choix s’est imposé naturellement du fait de l’implication du groupe dans la construction, la mise en service et l’étalonnage du calorimètre à argon liquide ATLAS. En particulier, l’étalonnage de l’énergie des photons réalisée au LAPP était un élément essentiel de la découverte : pour garantir une détermination correcte de la masse et la meilleure résolution expérimentale possible. Les physiciens du groupe ont conçu l’analyse H→ɣɣ bien avant le démarrage du LHC. Les contributions du groupe à l’analyse de la découverte comprenaient la modélisation de bruit de fond, qui était cruciale en raison du faible rapport signal sur bruit de fond, et l’analyse statistique finale avec ses vérifications pour assurer la certitude des résultats. Notre analyse statistique a également offert de premiers aperçus sur les couplages de Higgs grâce à des mesures séparées de différents mécanismes de production de Higgs.

Du fait de la masse plutôt faible du boson de Higgs ( 125 GeV) et du fait de la pureté de la signature des photons dans le détecteur, le canal diphotonique sur lequel travaillait le groupe ATLAS LAPP s’est révélé être le canal de découverte le plus important.

L’annonce de la découverte du boson de Higgs a finalement été faite par les collaborations ATLAS et CMS le 4 juillet 2012. L’année suivante, François Englert et Peter Higgs obtiennent le Prix Nobel de Physique pour cette découverte.

L’implication du groupe ATLAS du LAPP après la découverte

Le canal de désintégration en deux photons permet aujourd’hui d’étudier précisément ses sections efficaces de production différentielles en fonction des différentes variables cinématiques, comme par exemple le nombre de jets coproduits.

Au cœur du travail du groupe est la mesure des couplages du boson de Higgs et de ses « Simplified Template Cross Sections » (STXS). Le groupe est investi sur plusieurs aspects de l’analyse : la modélisation des bruits de fond, l’optimisation des catégories enrichies en certains modes de production en utilisant une approche d’apprentissage automatique par « machine learning », le traitement statistique et l’interprétation théorique. Les résultats sont interprétés en utilisant une approche basée sur un Lagrangien Effectif (Effective Field Theory, EFT), qui permet d’identifier des phénomènes au-delà du Modèle Standard.

En plus des mesures de couplages, le groupe ATLAS LAPP est également impliqué dans des études d’autres propriétés du boson de Higgs, telles que la masse et la largeur. Nous avons également recherché d’autres bosons de Higgs à faible masse (10-60 GeV) et à masse élevée (plus de 125 GeV).

Résultats actuels des mesures : https://arxiv.org/abs/2202.00487

Le groupe ATLAS du LAPP a également contribué à la recherche de la production simultanée de deux bosons de Higgs. Observer le couplage du Higgs avec lui-même reste l’un des objectifs majeurs du programme du Run 3 du LHC et HL-LHC. Mesurer ce couplage donnera accès à la forme du potentiel du champs de Higgs.

En plus des études sur le boson de Higgs, le groupe du LAPP recherche de nouveaux phénomènes à l’état final avec deux leptons et étudie les interactions à plusieurs bosons de jauge (W, Z, y), et en particulier leur diffusion. L’observation d’anomalies dans ces processus rares serait un signe de nouvelle physique.

Plus de données et une énergie plus élevée fournie par le LHC au cours de Run 3 et du HL-LHC nous permettront de sonder le modèle standard à des niveaux impossibles à atteindre auparavant.

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