Soutenance

Marc Eisenmann – Soutenance de thèse – 10 nov. 2020

Utilisation d’états comprimés de la lumière pour la réduction du bruit quantique dans le détecteur d’ondes gravitationnelles Advanced Virgo

Les détecteurs d’ondes gravitationnelles actuels, comme LIGO, Virgo et KAGRA, sont des interféromètres laser. Cette technique consiste à injecter un faisceau laser par un port d’entrée, qui est ensuite séparé dans deux bras de plusieurs kilomètres de long par un miroir semi-réfléchissant. Au bout de chaque bras, un miroir renvoie le faisceau vers le miroir semi-réfléchissant. Les deux faisceaux interfèrent alors et la puissance du faisceau résultant, mesuré au port de détection, contient l’information de la longueur relative des deux bras. Lorsqu’une onde gravitationnelle traverse le détecteur, cette longueur relative varie au cours du temps. Plusieurs sources de bruits dégradent la qualité du signal enregistré, ce qui affecte le nombre d’ondes gravitationnelles observable. Actuellement, cette sensibilité est limitée par le bruit quantique à hautes fréquences.Une onde électromagnétique décrite par la mécanique quantique possède une amplitude classique à laquelle s’ajoute des fluctuations quantiques en amplitude et en phase. Un état avec une amplitude classique nulle est appelé état du vide, mais présente quand même ces fluctuations quantiques. Ainsi, dans le détecteur, bien qu’aucun faisceau lumineux ne soit introduit par le port de détection, l’état du vide est présent. Ce sont alors les fluctuations quantiques de cet état du vide qui sont responsables du bruit quantique de l’interféromètre. En particulier, les fluctuations en phase et en amplitude sont respectivement responsables du bruit quantique à hautes et à basses fréquences ; la séparation entre ces deux régions se situant à environ 100 Hz.Les travaux présentés dans cette thèse portent sur l’injection d’états comprimés du vide dans le détecteur Virgo via le port de détection afin d’abaisser le bruit quantique. Ces états sont caractérisés par le fait d’avoir leurs fluctuations en phase (amplitude) réduites ce qui permet de diminuer le bruit quantique à haute (basse) fréquence. 

Comme le détecteur Virgo est actuellement uniquement limité par le bruit quantique à haute fréquence, seul des états comprimés du vide en phase ont été utilisés lors de la dernière période d’observation : O3. En amont, il a d’abord fallu s’assurer que ces états comprimés du vide avaient les paramètres géométriques et de phase par rapport au faisceau de l’interféromètre tels qu’ils ne soient pas dégradés. Des boucles de contrôles ont permis de maintenir ces paramètres à leurs valeurs nominales au cours d’O3, période longue d’une année. La diminution du bruit quantique à haute fréquence, mais aussi l’augmentation du bruit quantique à basse fréquence, ont pu être mesurées pour la première fois avec le détecteur Virgo. Ces observations ont été en accord avec les mesures des pertes qui affectent l’état comprimé du vide.A partir d’O4, le bruit quantique sera également limitant à basse fréquence. Il sera alors possible d’utiliser des états comprimés du vide ayant leurs fluctuations en amplitude réduites à basse fréquence et leurs fluctuations en phase réduites à haute fréquence. Ainsi, la totalité du bruit quantique peut être diminué. De tels états peuvent être générés en utilisant une cavité optique appelée cavité de filtrage. La seconde partie des travaux présentés dans cette thèse a consisté à définir les paramètres optiques de la cavité de filtrage qui sera installée sur Virgo pour O4. Pour cela, il a d’abord fallu étudier les sources de dégradations des états comprimés du vide. Cela a ensuite permis de définir la longueur de la cavité de filtrage et l’ensemble des paramètres des miroirs qui la composent. Finalement, l’implémentation de cette cavité de filtrage au sein de l’infrastructure de Virgo a été étudiée. Cela a permis de montrer que l’utilisation d’états comprimés permettra effectivement de réduire le bruit quantique sur tout le spectre de sensibilité de Virgo.